Café littéraire
Animateur : Pierre VINCENT
Secrétaire : Nicole METIVIER
Armand BEMER
Ecrivain, Poète
Dans les salons du Château de Madame de Graffigny à Villers-Lès-Nancy, autour d'un noyau d'adhérents et de sympathisants réuni dans le cadre du troisième café littéraire de la saison, l'équipe de l'APAC-NANCY accueille chaleureusement Armand BEMER, auteur régional, pour la présentation de son dernier ouvrage "A l'encre de la Moselle". Mais, avant d'ouvrir les pages de son recueil de nouvelles, l'animateur, Pierre VINCENT, propose à l'invité de dresser à l'auditoire quelques traits de son personnage. Et, ce Mosellan, homme de lettres, tout à la fois poète et écrivain, [engagé sur le plan littéraire (Président de la SPAF Lorraine), écologiste sur le plan politique (élu local depuis vingt-cinq ans)], lève le voile de sa naissance à Manom et de son enfance à Berg-sur-Moselle, au cœur du pays des trois frontières : France, Luxembourg et Allemagne, avant d'affirmer son profond attachement à sa langue maternelle, "le platt", (dialecte considéré comme "langue des bouseux" durant ses études secondaires au lycée Charlemagne à Thionville langue régionale parlée mais non écrite ni enseignée dans les écoles à son époque) qui, néanmoins, exercera une influence primordiale dans la structuration de sa personnalité et influera, sans doute, sur ses choix linguistiques. De fait, au terme de son cursus universitaire à Metz, il devient professeur d'anglais, jongle avec l'allemand, et, par intérêt personnel, approche l'hébreu, l'espagnol, etc…. Aujourd'hui à la retraite, ce plattophone convaincu s'attache à redonner des lettres de noblesse à sa langue maternelle. Son enfance évoquée, Pierre VINCENT interpelle Armand BEMER sur le sens du titre de son livre "A l'encre de la Moselle" ; est-ce par évocation du passé : odeur, encrier de la jeunesse, eau de la rivière, eau vive ancrée dans un enracinement ou est-ce pour arrêter la fuite du temps qui coule et s'enfuit inexorablement ? Et l'auteur d'affirmer que la finalité de son ouvrage s'enracine dans le désir de rendre un hommage à ses ancêtres, sa famille, son passé, à "tous ces gens de peu" qui ont forgé leur terre à force de labeur et, dans le même temps, participe à une volonté de transmission de l'Histoire à destination des générations montantes qui n'ont pas traversé cette période particulière. Ainsi, dans son livre de huit nouvelles, la deuxième, davantage apparentée à une saga, constitue une ode aux vins de Contz et de la Moselle, au-travers des cinquante années - (1870-1920) - qu'ont vécues trois générations de vignerons éprouvées par deux guerres avec l'Allemagne : défaite de Sedan en 1871 et lâchage des députés français, annexion des Mosellans à l'Allemagne, (germanisation forcée, perte d'identité, enrôlement dans les armées allemandes) puis touchées par la maladie de la vigne (mildiou - oïdium - phylloxera) avec, pour conséquences, une éradication totale des vignobles, un greffage massif de nouveaux pieds américains avec des cépages locaux et l'abandon de cette culture prospère après le rattachement à la France, en 1918.
Bien qu'emporté par la turbulence des évènements historiques où ses personnages l'entraînent, l'auteur n'en oublie pas pour autant, au-travers de ses différentes chroniques, de nous guider sur les traces de son enfance passée à Sierck, dans l'église où il fut enfant de chœur et dont les cloches de l'angélus tintent encore à ses oreilles, nous invite aux rituels des rogations devant les bildstocks (calvaires), des crécelles au temps pascal, nous fait pousser la porte du cimetière, mémoire vivante, nous fait voyager dans le Jaengelchen, petit train construit par les Allemands pour relier Mondorf à Thionville, se souvient encore des bohémiens de passage, du facteur des années 60 et rapporte la légende des sorcières de Sierck, etc…
Dans ses nouvelles où "le platt" se mêle harmonieusement au récit, où "les mots sont réparateurs parce qu'ils ont un pouvoir supérieur aux armes et qu'il y a toujours une issue", l'écrivain, aux fortes convictions européennes, nous conduit jusqu'aux Accords de Schengen dans une ouverture des frontières et de réconciliation avec l'Histoire … "car les enfants sont tous les mêmes, à Paris et à Göttingen" - (Barbara).
Passionnant débat, entrecoupé de lectures de l'ouvrage, par Nicole LAPORTE et Nelly VINCENT, puis prolongé par un dialogue entre l'auteur et un auditeur alsacien dont la mémoire plonge plus en arrière dans la connaissance des mœurs et coutumes de ce passé.
Puis, après une séance de dédicaces offerte aux acquéreurs du livre "A l'encre de la Moselle" et autres ouvrages d'Armand BEMER, la soirée s'achève au restaurant de la Linotte des Bois pour le petit groupe de convives désireux de prolonger la discussion engagée avec l'auteur.
La Secrétaire,
N. METIVIER.


